Les arts martiaux et sports de combat listent fréquemment les points vitaux. Tout simplement car cela va permettre d’édicter une règle de conduite « sportive » pour pratiquer la compétition. On va donc interdire certaines zones. En Krav Maga, nous préférons le terme de zones sensibles, ou plus justement de points faibles. Tout simplement car la vie n’est pas forcément mise en balance.
Un simple rappel des principaux points vitaux régulièrement décrits :
les yeux; la gorge; le plexus; les parties génitales; les genoux; les tibias/chevilles; les pieds… Entre autres.
Le nez est aussi souvent cité. Il a, par exemple, a un effet intéressant car, il peut casser rapidement et provoquer ainsi le déclenchement des glandes lacrymales qui peuvent nous aider lors d’une confrontation à amoindrir la vue de l’adversaire (déjà perturbée par l’effet tunnel). Mais face à quelqu’un de « dur au mal » (rugbyman, pratiquant de MMA ou de JJB, boxeur thai ou kick…), le nez cassé ne se sentira qu’après coup dans une bagarre réelle, et contrairement à l’idée reçue, on ne peut pas « tuer » quelqu’un en lui remontant le nez d’un coup de paume vers le cerveau (un os empêche cela et fracasserait le nez en miettes avant qu’un morceau arrive au cerveau, il s’agit donc d’une légende urbaine). Raison pour laquelle en Krav nous travaillons des enchaînements de coups utiles, qui d’années en années se fluidifient et s’automatisent comme des réflexes en fonction de la position du partenaire sur les impacts. Le nez : point NON VITAL.
Les yeux ont un effet incapacitant immédiat. Outre la possibilité de perdre son oeil (ce qui arrive à nombre de bagarreurs de rue), la douleur est surmontable dans l’instant, mais la peur de perdre l’oeil prend vite le dessus ainsi que la vision réduite de 50% et l’instinct de vouloir préserver l’oeil valide restant. Raison pour laquelle nous travaillons nos phases de combat avec des gants de boxe et non des mitaines, tout comme les pratiquants de MMA lorsqu’ils travaillent la partie pieds-poings. Certains avancent l’argument que puisque ce n’est pas mortel et que l’on a toujours un oeil pour se battre, on peut continuer. Que l’oeil est un organe souple et d’une extraordinaire résistance. D’expérience, l’oeil, on s’arrête net ! De toute façon, on n’en meurt pas. Le doigt dans l’oeil : point NON VITAL.
La gorge : un crochet à la gorge (donc qui va arriver par la partie non cartilagineuse, mais sur la partie fortement irriguée) peut provoquer un KO. Un direct à la gorge peut provoquer une fracture du larynx et s’avérer encore plus dommageable voire mortel. Un coup violent peut entraîner l’arrêt net de la respiration, une hémorragie interne avec étouffement dans son propre sang, l’enfoncement du larynx et de la trachée artère. Un coup léger est incapacitant et pourra même transformer la voix de l’agresseur ultérieurement. La gorge : point VITAL.
Les parties génitales : certes cela fait très mal et peut être incapacitant. Toutefois, on remarque que sous stress, alcoolisé ou drogué, la douleur n’est pas forcément ressentie de la même façon. Même si au Krav Maga nous avons une grande habitude des frappes aux parties (car c’est une zone que nous pouvons facilement travailler en la protégeant, au contraire des yeux ou de la gorge), on s’aperçoit que sous stress la zone n’est pas aussi aisée à toucher et surtout que le combattant adverse peut faire preuve d’une étonnante résistance à ce coup. Bien entendu, un coup très fort et bien placé va arrêter net (fracture ou luxation testiculaire, voire fracture du bassin et de l’urètre). On ne va probablement pas en mourir mais les complications à venir seront très importantes sans oublier l’impact psychologique. Partie génitales : point NON VITAL.
Genous, tibias, pieds et plexus sont bien entendu des parties non vitales mais qui peuvent endommager la capacité à combattre.
Il reste une zone sensible dont nous n’avons pas parlé : la tête. Les coups à la tête peuvent provoquer un KO, voire une hémorragie interne, un oedème, des complications graves, et une mauvaise chute consécutive au KO. Je considère que ce point est un point VITAL (affaire Clément Méric pour ne citer que cet exemple récent).
Raisons pour lesquelles il faut surtout retenir les principes du Krav Maga : je cherche à réduire durement, rapidement et efficacement les capacités de combat de l’agresseur : je travaille donc sur les zones sensibles. Mais surtout c’est la fluidité dans l’enchaînement des coups qui devra nécessairement suivre qui peut nous donner un avantage certain. Face à un combattant expérimenté, une zone sensible ne sera peut être pas suffisante pour le mettre hors de combat. Mais c’est un travail préparatoire à d’autres frappes. L’enchaînement des frappes utiles et alternées sur différentes zones, voilà bien ce qui est important. Raison pour laquelle, au Krav Maga, savoir donner un coup de poing et un coup de pied sont des bases que l’on travaille sans cesse et qui rendent efficaces le reste des techniques ultérieures. Sans contre efficace sur une attaque au couteau, sur laquelle à la base nous n’avons que de très faibles probabilités de nous en sortir, autant dire qu’il vaut mieux dépenser son argent en stages de survie où l’on apprend à manger des pissenlits par la racine. Idem sur les désarmements de pistolets. La technique est importante, mais c’est un tout ! Elle s’accompagne souvent d’un contre. Si ce contre est inefficace, hors distance, sans poids de corps, un adversaire supérieur en force pourra probablement reprendre le contrôle de son arme d’un mouvement brusque. Apprendre à donner un coup de poing, un coup de pied est bien moins « fun » que de s’imaginer être Jason Bourne. Mais c’est le début nécessaire de la prise de conscience d’une nécessaire efficacité. Enfin, ces zones sensibles sont efficaces, c’est prouvé. Mais allons-nous oser crever un oeil ? Allons-nous oser frapper à la gorge ? Si l’on n’hésite pas à frapper les parties car on en a pris l’habitude à l’entraînement, oserons-nous frapper suffisamment fort . Là encore, ce qui va primer, c’est la détermination. Sans détermination et, finalement, un peu de courage, toutes nos techniques ne serviront pas. Le travail est donc physique, mais également psychologique, notamment à l’occasion des mises en situation que l’on peut faire à l’occasion afin de tester ce qui a été enseigné dans des conditions plus « rudes » et mesurer tout le chemin qui reste à faire.